La cour d’appel de Paris a confirmé mercredi la mise en examen du groupe cimentier Lafarge pour « complicité de crimes contre l’humanité » concernant ses activités jusqu’en 2014 en Syrie, à la satisfaction des parties civiles.
La chambre de l’instruction parisienne était invitée à se prononcer une nouvelle fois sur les demandes du groupe Lafarge d’annulation de ses mises en examen pour l’infraction, rarissime pour une entreprise, de « complicité de crimes contre l’humanité », et pour celle de « mise en danger de la vie d’autrui ».
En novembre 2019, cette chambre d’appel avait accédé à la première demande du groupe, estimant que la seule intention du groupe était « la poursuite de l’activité de la cimenterie », tout en rejetant la seconde. Mais en septembre dernier, la Cour de cassation l’avait invitée à revoir sa copie.
Sa chambre criminelle avait estimé que, pour que cette complicité de crimes contre l’humanité puisse être retenue, il suffisait que l’auteur de l’infraction « ait connaissance de ce que les auteurs principaux commettent ou vont commettre un tel crime contre l’humanité et que par son aide ou assistance, il en facilite la préparation ou la consommation ».
Après un retour à la chambre de l’instruction et une longue audience en mars, la cour d’appel de Paris a donc décidé de maintenir la « complicité de crimes contre l’humanité » et la « mise en danger de la vie d’autrui » au dossier pour le groupe cimentier.
Dans le cadre de cette information judiciaire ouverte en juin 2017, le groupe désormais filiale d’Holcim est soupçonné d’avoir versé en 2013 et 2014, via sa filiale syrienne Lafarge Cement Syria (LCS), plusieurs millions d’euros à des groupes terroristes, dont l’organisation Etat islamique (EI), ainsi qu’à des intermédiaires, afin de maintenir l’activité d’une cimenterie en Syrie à Jalabiya alors que le pays s’enfonçait dans la guerre.
L’enquête a évalué que ces versements pourraient avoir atteint entre 4,8 et 10 millions d’euros pour le seul groupe EI. Lafarge est également suspecté d’avoir vendu du ciment de l’usine à l’EI et d’avoir payé des intermédiaires pour s’approvisionner en matières premières auprès de factions jihadistes. Le groupe avait investi 680 millions d’euros dans la construction du site de Jalabiya, achevé en 2010.